lundi 5 décembre 2011

Le triste bilan des conservateurs

Depuis la création de ce blog, je n’ai rédigé aucun billet sur les conservateurs de Stephen Harper. Pourtant, ce n’est pas faute d’avoir du matériel pour en discuter. Chaque jour, ce gouvernement commet des bourdes et des âneries qui me font réagir, sans que je ne prenne le temps d’en glisser quelques mots. Ce qui me rassure, c’est que les conservateurs sont très peu populaires au Québec (5 sièges sur 166 à la Chambre des communes) et je sais ne pas être le seul à éprouver de la tristesse à les voir former un gouvernement majoritaire au fédéral.

En même temps, ce constat est inquiétant puisque c'est la première fois dans l'histoire de la fédération qu'un gouvernement devient majoritaire avec un si faible appui au Québec.

Je vous présente aujourd’hui une liste spontanée des raisons pour lesquelles je ne me reconnais pas du tout dans les politiques et les valeurs de ce gouvernement. Merci d’ajouter des éléments à cette liste pour me refraîchir la mémoire et\ou vous permettre d'exprimer votre indignation. Si toutefois vous approuvez ce gouvernement, je serais curieux de savoir pourquoi.

1. Le mépris de la démocratie

C'est probablement l'aspect le plus décevant du gouvernement Harper. Rappelez-vous que les conservateurs s'étaient faits élire pour la première fois en 2006 dans la foulée du scandale des commandites, avec comme promesses celles de la transparence et de l'assainissement des moeurs politiques. Or, il y a quelques semaines, les conservateurs plaidaient finalement coupables (après l'avoir longtemps nié) et reconnaissaient avoir dépensé illégalement 1,3 millions de dollars (par le stratagème du "in and out") durant la campagne électorale de 2006.

Par ailleurs, on sait que le Bureau du premier ministre contrôle la circulation de l'information comme rarement un gouvernement l'a fait auparavant. Les hauts-fonctionnaires et plusieurs ministres doivent ainsi obtenir sa permission avant de donner une entrevue à des journalistes. Lors d'annonces officielles importantes à l'extérieur de la capitale, les journalistes de la Tribune ne sont pas toujours avisés des déplacements du gouvernement, afin d'en privilégier quelques-uns triés sur le volet.

La plupart des journalistes au Canada se plaignent aussi des délais déraisonnables dans les réponses données par le gouvernement aux demandes d'accès à l'information (en vertu de la loi). En 2008, rappelez-vous qu'il avait été extrêmement difficile d'obtenir de l'information portant sur le sort des Afghans capturés par l'armée canadienne. On se demande par ailleurs pourquoi Omar Kadhr, le dernier détenu occidental à la prison de Guantanamo, n'est toujours pas rapatrié au Canada.

Enfin, rappelons-nous que depuis que les conservateurs sont au pouvoir, ils ont prorogé la session parlementaire à deux reprises, à chaque fois pour des motifs douteux et déraisonnables.

Observez avec attention les décisions et déclarations de ce gouvernement et vous constaterez qu'il agit comme si l'État lui appartenait. Les conservateurs pratiquent le culte du secret comme s'ils avaient tous les droits et surtout, comme si le peuple avait implicitement accepté de céder tous les siens. C'était la raison pour laquelle j'ai choisi cette citation de Hobbes pour mon billet d'hier (sur ce blog). Lisez cet excellent texte du philosophe Christian Nadeau qui développe l'idée d'un lien entre Hobbes et Harper.

2. Le mépris de l’environnement

Les conservateurs ont qualifié le protocole de Kyoto (sur la réduction des gaz à effet de serre) de "complot socialiste" et viennent de refuser d'adhérer au renouvellement de cette entente à Durban en Afrique du Sud. Rappelons que le protocole de Kyoto avait été signé par le Canada (à l'époque de Jean Chrétien), mais que nous n'en avons pas respecté les objectifs.

Le hic est double. Non seulement nous ne faisons pas notre part en matière de lutte au réchauffement climatique, mais notre réputation internationale est ternie et cela risque de coûter 19 milliards de dollars aux contribuables canadiens. Le protocole de Kyoto prévoyait en effet des pénalités pour les États qui ne respecteraient pas leurs engagements.

3. La négligence à propos du bilinguisme officiel

Les plus récents exemples sont les nominations d'unilingues anglophones à des postes prestigieux (Michael Moldaver à la Cour suprême, Michael Ferguson au poste de Vérificateur général et Angelo Persichelli comme directeur des communications de Harper). C'était la deuxième fois que Harper nommait un unilingue anglophone à la Cour suprême, après Marshall Rothstein.

La place laissée au français lors des Jeux olympiques de Vancouver était minime (le Commissaire aux langues officielles Graham Fraser l'a reconnu) et le ministre des Affaires étrangères John Baird n'utilise maintenant que des cartes professionnelles unilingues. Son site Web n'est disponible qu'en anglais, alors que 7% des électeurs de sa circonscription sont francophones.

4. La réhabilitation des symboles de la monarchie

Les exemples sont multiples: un tableau du peintre québécois Alfred Pellan a été retiré de l'entrée du ministère des Affaires étrangères (celui de John Baird) pour être remplacé par un portrait de la reine; une consigne a été donnée aux ambassades canadiennes pour qu'elles affichent elles aussi son portrait, on a renommé nos institutions militaires avec les appellations "Marine Royale canadienne" et "Aviation Royale canadienne"....

Il semble qu'une majorité de Canadiens approuve ces changements. Pour ma part, je ne me reconnais aucune affinité avec les symboles de la monarchie et je crois qu'il faudrait plutôt s'en débarrasser. On a tendance à négliger le fait que si notre système politique est à ce point centralisé entre les mains d'un premier ministre puissant et contrôlant, c'est précisément qu'il découle d'un système monarchique.

5. Le support inconditionnel à Israël

Jamais un gouvernement fédéral n'a manifesté un soutien si indéfectible à l'État d'Israël. Sans entrer ici dans les méandres du conflit israélo-palestinien, j'ai toujours apprécié davantage l'approche nuancée et tempérée des libéraux à cet égard. Récemment, le refus d'accepter l'entrée de la Palestine à l'UNESCO (et le retrait du financement octroyé à cette organisation) m'a déçu. Encore une fois, notre réputation internationale est affectée négativement et nous avons manqué une belle de chance de contribuer à la seule solution possible dans ce conflit: la naissance d'un État palestinien libre et indépendant.

6. Le retour du religieux dans le politique

On a tendance à l'oublier, mais durant ses premières années au pouvoir, Stephen Harper terminait plusieurs de ses discours par un " God Bless Canada".

En janvier 2011, une députée fédérale libérale tombe par terre à bord d'un avion, car elle se sent mal. Trois députés conservateurs se sont approchés d'elle non pour lui venir en aide, mais - tenez-vous bien - pour entamer des incantations et des prières!

Gary Goodyear, le ministre d'État aux Sciences et Technologies, a déjà affirmé qu'il était créationniste (il s'est rétracté par la suite).

C'est une réalité méconnue, mais la droite fondamentaliste exerce une influence très importante sur le gouvernement actuel. Marci McDonald, ancienne chef de bureau pour la revue Macleans, a justement publié un ouvrage sur cette question (The Armageddon Factor) que je me promets de lire durant la période des Fêtes. Elle soutient que plusieurs des valeurs défendues par le gouvernement s'expliquent par l'influence de ce lobby (position pro-Israël, position critique vis-à-vis l'avortement, position critique à l'endroit du mariage homosexuel...).

7. La baisse d'impôts aux corporations

Le gouvernement Harper a été particulièrement généreux envers les grandes corporations depuis son arrivée au pouvoir. En 2012, le Canada aura le plus faible taux d'impôts corporatifs du G7. Dans une période marquée par l'accroissement des inégalités au Canada, il me semble que l'on pourrait en exiger un peu plus du secteur privé.

Cette liste pourrait s'allonger davantage (abolition du registre des armes à feu, projet de loi C-10 en matière criminelle, abolition du recensement détaillé obligatoire....).

À votre avis, quelles ont été les pires décisions des conservateurs depuis qu'ils sont au pouvoir?

2 commentaires:

  1. Excellent papier...
    Pour poursuivre : http://leblogueduvoisin.blogspot.com/2010/07/la-rigidite-de-stephen-harper-4.html

    et

    http://leblogueduvoisin.blogspot.com/2011/04/harper-sinspire-t-il-de-poutine.html

    RépondreSupprimer
  2. Salut voisin,

    Oui, très pertinent ton lien entre Poutine
    et Harper....Ça fait bien le pont entre
    mes deux derniers billets!

    RépondreSupprimer